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Le bilan (rimanenze) du livre principal de compte de Jean et Lucrèce Detrico (1520-1533)
Sabine Florence Fabijanec
Sažetak
Dans les archives de Zadar, se trouve un document exceptionnel parce que rare. Il s’agit du livre des bilans d’un couple d’entrepreneurs zadarois, Jean et Lucrèce Detrico, daté de 1520 à 1533. Les Detrico figurent parmi les vingt lignées nobiliaires de Zadar. C’est une ancienne famille zadaroise dont la généalogie remonte au XIIIe siècle. Ses membres sont connus pour être des hommes politiques actifs et de grands propriétaires terriens. Ils détiennent de nombreuses charges grâce à leur fidélité à la Sérénissime.
Dans ce livre de comptes, on relève les noms de trente-sept personnes : trois serviteurs, quatre apprentis, et des partenaires commerciaux. Parmi ceux-ci figure le marchand Mathieu Zapić. Tout porte à croire qu’il est le comptable du couple. On assisterait donc, au XVIe siècle à une évolution dans la tenue des livres de comptes. Les marchands ne sont plus obligés de reporter seuls leurs transactions, mais ils peuvent en donner la responsabilité à un homme de confiance. Cela est vrai également à Dubrovnik. On y distingue la fonction de l’entrepreneur qui mène les affaires et du comptable qui mène les livres de comptes. Parmi les noms qui apparaissent dans ce bilan, le plus illustre est celui d’André Civran, provéditeur principal de la Dalmatie entre 1524 et 1526. De sorte que la famille Detrico jouit toujours d’appuis politiques solides. Les autres partenaires sont variés : des artisans, des paysans du district et des nobles, propriétaires terriens, de l’arrière-pays croate.
Chaque feuillet est consacré à une année, éventuellement deux. Chaque page est divisée en deux colonnes. Sur la colonne de gauche figurent tous les “die dar” et sur celle de droite les “die auer”. Le total des dettes est une première fois noté au bas de la colonne des dépenses, puis reporté en haut de la colonne des reçus. Tous les montants avancés sont rattachés à la page du livre principal qui les concerne (“a carte…”).
Le vocabulaire employé dans ce bilan semble se rapporter à une activité industrielle de textile. On trouve en effet des instruments de menuiserie et de charpenterie (clous de tailles diverses, cordelle, corde, chaux, fer et plomb, maillet, planches et poutres de traverse ou de soutien, plaques de pierre), des parois de séparations sont mentionnées, le verbe fouler et le pilon à fouler y figurent. Parmi les articles cités, ceux de type vestimentaire dominent (bonnet, fils, rubans, boutons, ceinture, bottes, robes, nombreuses pièces de tissus de couleurs variées, dont du feutre et de la soie, de la laine, de la rasse). On relève encore de la cire et des bougies, des bijoux, des verres, des peaux, de l’encens, du poivre, des pièces de navire, des selles, des caisses, du suif, des grelots, des tonneaux en bois, des paniers, sans compter le vocabulaire qui n’a pas encore été déchiffré.
Le couple (le livre est d’abord au nom de Jean, puis à celui de Lucrèce), investirait donc dans l’aménagement d’une boutique de toiles, d’un atelier de fabrication et de teinte de textiles ou encore, de tapisserie. Son entreprise se situe durant la période d’accalmie politique (après avoir été exsangue du fait des incursions turques, en 1521, Zadar entre dans une phase de reprise qui se poursuit jusqu’en 1537, date d’entrée en guerre avec l’Empire ottoman).
Cet unique exemple montre deux choses. D’une part, on assiste à la vivacité de l’entreprise économique de la population zadaroise qui se ressaisit aussitôt les grandes vagues de violence passées. D’autre part, on a le témoignage que la pratique de la tenue dans le livre de compte en partie double est bien présente, non seulement à Dubrovnik, grand centre commercial, mais aussi sur le reste du territoire dalmate, dont les centres sont plus modestes.
Ključne riječi
Zadar; Moyen Age; histoire economique; livre de compte
Hrčak ID:
9393
URI
Datum izdavanja:
1.3.2003.
Posjeta: 2.183 *